J’ai bien ri il y a quelques jours en écoutant un reportage pendant le JT de France 2, qui évoquait un kit de préparation au mariage civil que souhaite mettre en place le gouvernement.
De quoi s’agit-il ? Je suis allée me renseigner sur internet, vous pouvez comme moi vous référer notamment aux articles de l’Express et du Nouvel Obs. L’initiative vient de Claude Greff, la secrétaire d’Etat chargée de la famille. Ses annonces concernant ce kit remontent au 19 janvier dernier. L’idée est de sensibiliser la population, et en particulier les jeunes, aux droits et devoirs inhérents à la conclusion d’un mariage civil. On en parlerait à l’école ou pendant la JAPD, les élus municipaux seraient encadrés par une Charte Républicaine du Mariage actualisée, les futurs mariés participeraient à des réunions pré-mariage, d’une part pour se familiariser avec le cadre juridique (et donc notamment avec les enjeux en cas de divorce) mais aussi pour que la cérémonie de leur mariage civil soit plus personnalisée.
L’objectif annoncé est de renforcer le mariage (leur nombre a diminué de 10 000 entre 2010 et 2011) et, subséquemment, de limiter les divorces (aujourd’hui, un mariage sur deux se solde par un divorce), dont on reconnaît qu’ils ont un réel coût social (tant financier qu’affectif).
Je suis assez perplexe. La mesure me semble d’une naïveté incroyable.
Sensibiliser les jeunes mariés sur les conséquences potentielles d’un divorce, je trouve ça plutôt bien. Mais, selon moi, cela devrait déboucher, en toute logique, plutôt sur une diminution des mariages. Car, quand les hommes (puisque ce sont souvent eux qui gagnent plus que les femmes) vont se rendre compte de tout ce qu’ils peuvent potentiellement donner à leur ex-femme en cas de divorce, même si celui-ci a été initié par elle (et c’est le cas dans les 70% des divorces), ils risquent d’avoir plutôt envie de se rabattre sur le PACS, qui leur permet, tant qu’ils sont en couple, d’avoir les mêmes avantages que le mariage, mais qui, en cas de séparation, les soustrait au principe de la fameuse prestation compensatoire, mécanisme des plus désuets et machistes, qui doit permettre de compenser la perte de niveau de vie de la femme suite à son divorce (en d’autres termes : l’ex-mari continue d’entretenir l’ex-femme). Je peux être très prolixe sur ce sujet, j’aurai l’occasion d’y revenir.
Si on pousse la réflexion, pensez-vous qu’il faille expliquer aux futurs mariés ce que signifie le mot ‘fidélité’ ? Ils le prononcent, se le jurent devant M. le maire, point besoin de cours sur la teneur de ce serment. Or, nombre de divorces sont occasionnés, de près ou de loin, par des infidélités, autrement dit par un manquement aux devoirs de l’époux ou de l’épouse, qui sait pertinemment ce qu’il fait au moment où il va voir ailleurs. Pour autant, le divorce pour faute n’existe plus. La logique est donc la suivante : vous jurez fidélité devant le représentant de l’Etat. Plus tard, vous bafouez cette promesse, mais d’autres représentants de la Loi, en l’occurrence les Juges, estiment que cet adultère ne présume en rien d’une faute. Où est la logique ?
Je ne suis pas pour le retour d’un divorce pour faute. J’imagine que cela est logique au regard de l’évolution de la société, de même que la non-reconnaissance de l’adultère comme une faute va dans le sens de la protection des femmes. Celles-ci ont droit d’utiliser leur corps comme elles l’entendent.
Mais alors, pourquoi continuer à inscrire la fidélité comme un des liens fondamentaux du mariage ? N’est-ce pas cela qui est régressif ? Bref, l’annonce de ces mesures visant à soi-disant renforcer le mariage civil me semble plutôt révélatrice de la grande hypocrisie qui plane sur cette institution. Car, en public, on dit que les divorces ont ‘un coût social élevé’. Mais en privé, on sait pertinemment qu’ils génèrent énormément de richesses pour certains : avocats, notaires, juges, etc. (Demandez-vous : pourquoi la proposition de Rachida Dati en 2007, qui visait à permettre à certains couples de divorcer chez le notaire, a-t-elle provoqué un tel tollé chez les magistrats ?)
Quant à moi, je suis pacsée. Je n’ai pas eu besoin de passer devant le maire pour jurer fidélité. La fidélité est LE principe fondateur de mon couple, mais il n’est écrit nulle part. Et c’est peut-être pour cela qu’il vaut vraiment quelque chose.
L’engagement moral ne s’apprend pas à la veille de son mariage. Il est la résultante d’un long processus d’éducation, d’intégration de valeurs, au même titre que la citoyenneté ou la civilité. Un guide de bonne conduite ingurgité par les futurs mariés ne changera rien à la donne.
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